Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/108

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avec les Antilles, qui, en 1716, ne s’élevait qu’à 26 millions de livres, atteint, en 1788, le chiffre, très considérable pour l’époque, de plus de 260 millions ; la traite négrière seule occupe plus de 2 000 navires. Ainsi s’explique la grande prospérité des ports de l’Atlantique, de Bordeaux, de Nantes, et les progrès si marqués du Havre ; on comprend aussi que Marseille ne se limite plus à la Méditerranée et prenne une importance mondiale.

Si l’on considère encore que le commerce extérieur de la France a quadruplé de 1715 à 1789, qu’en 1788, il dépasse la valeur d’un milliard de livres, on conclura que c’est surtout au grand commerce maritime et colonial que l’on doit l’accumulation des capitaux, qui permettra d’entrevoir l’aube d’une révolution industrielle. Déjà, au cours du XVIIIe siècle, c’est l’importation du coton dans les ports normands qui crée l’industrie cotonnière de la région rouennaise ; à Nantes, c’est le commerce avec les « îles d’Amérique » qui donne naissance aux raffineries et aux manufactures d’indiennes.


5. Le capitalisme financier en France. — Cependant, comme le capitalisme commercial s’est beaucoup moins épanoui en France qu’en Angleterre, le capitalisme financier est loin aussi d’y prendre la même ampleur. Le système de Law a, il est vrai, suscité une fièvre de spéculations analogue à celle dont l’Angleterre a été le théâtre, et précisément au même moment. On vit se produire une hausse excessive des actions de la Société (de plus de 900 %). L’inflation fut aussi énorme, puisque, d’après les relevés du caissier Bourgeois, la Banque de Law émit pour plus de 3 milliards de billets de banque. Enfin, cette inflation a eu pour conséquence une hausse des prix de plus de 100 %, qui a frappé