Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/109

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tous les observateurs[1]. Il est certain que la chute du système eut pour effet de retarder les progrès du crédit : on se méfiera, pendant longtemps encore, du « papier », des valeurs mobilières. Toutefois, l’activité de Law, à certains égards, a été bienfaisante ; elle semble avoir donné un coup de fouet au mouvement commercial, comme l’a montré M. Gaston Martin[2] pour le port de Nantes.

Notons aussi que les banques, dont l’histoire est encore mal connue, ne cessent de se développer. Le nombre des banquiers s’accroît sensiblement, surtout à Paris (en 1721, on en compte déjà 51, tandis qu’il n’y en avait que 21 en 1703). Si les banquiers parisiens s’occupent surtout du crédit public, ils traitent aussi les affaires des gros négociants[3]. À Marseille, les maisons de banque se spécialisent dans les opérations commerciales avec le Levant, mais elles ne disposent que de faibles capitaux ; à Bordeaux, à Rouen, la banque a surtout affaire aux armateurs. La banque lyonnaise, qui avait tenu une si grande place au XVIe siècle et encore, dans une moindre mesure, au XVIIe, décline notablement, surtout après la chute du système de Law. Un trait caractéristique, c’est que la banque française, parisienne tout au moins, se trouve en partie entre les mains des Génevois, comme les Thélusson. D’ailleurs, les opérations bancaires ne sont pas encore l’apanage d’hommes d’affaires étroitement spécialisés ; elles constituent une occupation accessoire, non seulement pour bien des négociants, mais pour nombre de gens de finance (fermiers gé-

  1. Voy. par exemple, les lettres de l’abbé Tamisier au cardinal Gualterio, en 1719 et 1720, publiées dans les Mémoires de Saint-Simon, éd. A. de Boislisle, t. 37 (1925), p. 486.
  2. Le système de Law et la prospérité du port de Nantes (Revue d’Histoire économique, 1925).
  3. Voy. quelques données précises dans H. Sée, Le commerce de Saint-Malo au XVIIIe siècle.