Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/133

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espagnole —, vont ouvrir de nouveaux champs d’action au capitalisme. Pas immédiatement, sans doute ; mais, en ces pays neufs, les possibilités de développement sont immenses ; on le verra plus tard aux États-Unis. L’évolution y sera plus lente, plus tardive, mais le capitalisme finira par y triompher plus complètement que dans la vieille Europe. Après avoir contribué à enrichir les métropoles de l’ancien continent, les pays du nouveau monde entreront en concurrence avec elles.

On peut se rendre compte des causes profondes de, la grande transformation qui s’est produite. Pendant deux siècles, on a considéré — et non tout à fait sans raison — que la richesse dépendait surtout, pour une nation, de la possession d’un important stock monétaire ; grâce à elle, la Hollande a pu jouer le rôle prépondérant que l’on sait. Mais, n’ayant relativement que peu d’industries, un territoire exigu qui restreignait la quantité et la variété de ses productions naturelles, ne pouvant guère se livrer qu’au commerce de commission, elle devait finalement céder le pas à des pays, comme la France et surtout comme l’Angleterre, qui, produisant — et de plus en plus — des objets manufacturés pour l’exportation, finirent par l’emporter sur beaucoup de marchés.

Désormais, c’est la production industrielle qui va passer au premier plan. On voit ce phénomène s’annoncer, d’abord en Angleterre, vers le milieu du XVIIIe siècle, et c’est en ce pays que se produira ce qu’on a pu appeler plus ou moins justement la révolution industrielle. En France, le mouvement est plus tardif, mais des symptômes caractéristiques s’en manifestent dès la fin de l’Ancien Régime ; et il est juste de reconnaître que Colbert, en s’efforçant avec tant d’énergie de développer son système de manufactures, avait eu, en un sens, l’intuition de l’avenir.