Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/74

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gnifique empire colonial, ce ne fut pas uniquement le résultat de leur incurie, de leur incapacité économique, de la corruption de leurs administrateurs, grands ou petits. Sans doute, il faut tenir compte aussi de la nature même de la péninsule hispanique, plus africaine qu’européenne, en partie infertile, divisée en compartiments naturels, entre lesquels les communications sont singulièrement difficiles. M. Jean Brunhes ne dit-il pas, dans sa thèse sur l’Irrigation dans la péninsule hispanique, que « les conditions géographiques condamnent l’Espagne, en une partie de sa surface, à une presque irrémédiable pauvreté agricole » ? Ce n’est pas seulement la psychologie du peuple espagnol, enclin à la paresse, adonné surtout, à la suite d’une longue croisade contre les Musulmans, au métier des armes, ce n’est pas seulement non plus l’expulsion des Maures et des Juifs qui expliquent son incapacité à mettre en valeur les immenses colonies qu’il avait conquises. Est-il absolument juste de parler de la décadence économique de l’Espagne ? Sa valeur économique n’a-t-elle pas toujours été faible ? Les productions du sol étant, dans l’ensemble, peu abondantes, l’industrie n’ayant pu que faiblement se développer, l’Espagne, même mieux gouvernée, n’aurait pas eu les moyens d’échange suffisants pour conserver la maîtrise de soit commerce avec les pays d’outre-mer. Quoi qu’il en soit, l’afflux des métaux précieux, qu’elle ne pouvait conserver et faire Servir à des fins économiques, lui a été, fatalement funeste.


2. La politique mercantile. — L’afflux des métaux précieux en Europe a eu pour conséquence de développer la politique mercantile, ou du moins a contribué à le faire. Cette politique triomphe partout au XVIIe siècle. C’est pour attirer le plus d’argent possible dans le royaume et empêcher le numéraire de s’écouler hors de