Page:Ségur - Diloy le chemineau, Hachette, 1895.djvu/19

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n’y tiens guère ; depuis quelque temps vous avez toujours des choses désagréables à dire. Ce n’est pas comme Anne et Laurent, qui sont aimables et polis ; ils ne méprisent personne, ceux-là. Vous devriez faire comme eux, au lieu de prendre conseil de vos amis de Castelsot.

Félicie.

Anne et Laurent n’aiment que les pauvres gens ; et moi, je ne veux pas jouer avec des gens mal élevés et au-dessous de moi.

La bonne.

S’ils sont au-dessous de vous pour la fortune, ils sont au-dessus pour la bonté et la politesse. C’est très vilain de mépriser les gens parce qu’ils sont pauvres ; vous vous ferez détester de tout le monde si vous continuez.

Félicie.

Cela m’est bien égal que ces gens-là me détestent ; je n’ai pas besoin d’eux et ils ont besoin de nous.

La bonne, sévèrement.

Mademoiselle Félicie, souvenez-vous de la fable du Lion et du Rat. Le pauvre petit rat a sauvé le lion en rongeant les mailles du filet dans lequel le lion se trouvait pris, et dont il ne pouvait pas se dépêtrer malgré toute sa force. Il pourra bien vous arriver un jour d’avoir besoin d’un de ces pauvres gens que vous méprisez aujourd’hui.

Félicie.

Ah ! ah ! ah ! je voudrais bien voir cela. Moi avoir besoin des Germain ou des Mouchons, des Frolet, des Piret ? Ah ! ah ! ah ! »