Page:Ségur - Les Bons Enfants, édition 1893.djvu/103

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

elle le présenta à Valentine. Les rires redoublèrent ainsi que l’embarras de Mina, qui expliquait en allemand à M. de Chattemur qu’elle exécutait un ordre de sa maîtresse. Personne ne comprenait le langage de la pauvre fille ; on croyait qu’elle jouait un rôle ; les enfants riaient à se tordre ; Léonce était enchanté du succès de son espièglerie ; il se mit à sauter autour de Mina ; la malade, la garde-malade et les autres enfants se joignirent à lui, et la pauvre Allemande, entourée, enveloppée, perdit contenance, laissa échapper de ses mains le vase, dont elle ne pouvait se débarrasser, et, le voyant brisé, elle jeta sur Léonce un regard suppliant et se mit à pleurer.

Le père.

Qu’est-ce ? Je crois que Mina pleure ; ce n’est donc pas une scène arrangée entre vous ? »

Léonce, qui ne s’attendait pas du tout à cette fin de comédie et qui croyait ne faire qu’une plaisanterie innocente, fut très peiné du chagrin de Mina, et, s’approchant d’elle, il lui expliqua en allemand que ce n’était qu’une plaisanterie ; que sa maman n’avait pas demandé un vase de nuit, mais une serviette, et que c’était lui qui avait voulu un peu égayer le jeu. Il fit en français la même explication à son papa.

Léonce.

Je suis bien fâchée, je vous assure, papa, que la pauvre Mina s’afflige pour une chose si simple ; si j’avais cru devoir la chagriner, je ne l’aurais certainement pas fait.