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LES MALHEURS DE SOPHIE.

j’ai remarqué cette écorchure, et sa maman m’a raconté comment elle se l’était faite. Écoute bien ; c’est un beau trait d’Élisabeth. »

Sophie, enchantée d’avoir une histoire à entendre, rapprocha son petit fauteuil de sa maman pour mieux écouter.

madame de réan.

Tu sais qu’Élisabeth est très bonne, mais qu’elle est malheureusement un peu colère (Sophie baisse les yeux) ; il lui arrive même de taper sa bonne dans ses accès de colère. Elle en est désolée après, mais elle ne réfléchit qu’après, au lieu de réfléchir avant. Avant-hier elle repassait les robes et le linge de sa poupée ; sa bonne mettait les fers au feu, de peur qu’Élisabeth ne se brûlât. Élisabeth était ennuyée de ne pas les faire chauffer elle-même ; sa bonne le lui défendait, et l’arrêtait toutes les fois qu’elle voulait mettre son fer au feu sans lui en rien dire. Enfin elle trouva moyen d’arriver à la cheminée, et elle allait placer son fer, lorsque la bonne la vit, retira le fer et lui dit : « Puisque vous ne m’écoutez pas, Élisabeth, vous ne repasserez plus ; je prends les fers et je les remets dans l’armoire. — Je veux mes fers, cria Élisabeth ; je veux mes fers ! — Non, mademoiselle, vous ne les aurez pas. — Méchante Louise, rendez-moi mes fers, dit Élisabeth en colère. — Vous ne les aurez pas ; les voici enfermés », ajouta Louise en retirant la clef de l’armoire. Élisabeth, furieuse, voulut arracher la clef des mains de