Page:Ségur - Les petites filles modèles.djvu/163

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leine rejoindre Mme de Rosbourg ; les petites étaient tristes ; tout en jouant avec leurs poupées, elles pensaient combien on était plus heureuse quand on est sage.

Pendant ce temps, Sophie, restée seule dans le cabinet de pénitence, pleurait, non pas de repentir, mais de rage ; elle examina le cabinet pour voir si on ne pouvait pas s’en échapper : la fenêtre était si haute que, même en mettant la chaise sur la table, on ne pouvait pas y atteindre ; la porte, contre laquelle elle s’élança avec violence, était trop solide pour pouvoir être enfoncée. Elle chercha quelque chose à briser, à déchirer : les murs étaient nus, peints en gris ; il n’y avait d’autre meuble qu’une chaise en paille commune, une table en bois blanc commun ; l’encrier était un trou fait dans la table et rempli d’encre ; restaient la plume, le papier et le livre dans lequel elle devait copier. Sophie saisit la plume, la jeta par terre, l’écrasa sous ses pieds ; elle déchira le papier en mille morceaux, se précipita sur le livre, en arracha toutes les pages, qu’elle chiffonna et le mit en pièces ; elle voulut aussi briser la chaise, mais elle n’en eut pas la force et retomba par terre haletante et en sueur. Quand elle n’eut plus rien à casser et à déchirer, elle fut bien obligée de rester tranquille. Petit à petit, sa colère se calma, elle se mit à réfléchir, et elle fut épouvantée de ce qu’elle avait fait.