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LES VACANCES.

toi ? disait-il. Qui m’apprendra à prier ton Dieu, à être juste, à trouver le chemin de ton ciel ? Et si je prends ce chemin, je ne te retrouverai donc jamais ! Ô père, reste avec tes frères, tes enfants, tes esclaves ! Oui, nous sommes tous tes esclaves, prends nos femmes, nos enfants pour te servir ; mène-nous où tu voudras, mais ne nous quitte pas, ne nous laisse pas mourir de tristesse loin de toi ! »

Après ce discours, les petits sauvages m’en dirent autant, m’offrant d’être mes esclaves, de me faire régner à leur place après la mort de leur père, le roi.

Mon père et moi nous fûmes attendris, mais nous restâmes inexorables. Mon père promit de revenir le lendemain, et nous montâmes dans la chaloupe. Le beau visage de mon père devint radieux quand il se vit sur mer, sur une embarcation française, entouré de Français. Il ne parlait pas ; je le regardais, et moi qui le connais si bien, je vis qu’il priait. Moi aussi je remerciai Dieu, non de mon bonheur que je ne comprenais pas, mais du sien. La joie remplit mon cœur, et je fus ingrat pour les sauvages par tendresse pour mon père.

— Mon bon Paul, interrompit M. de Rosbourg, en lui serrant vivement la main, je ne saurais te