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LES VACANCES.

ne tombait pas, il continuait son sourire, et le maréchal sentait toujours la pointe du poignard pénétrer lentement dans sa poitrine. Il n’y avait pas un moment à perdre, il tira son second pistolet : la balle traversa également la poitrine du chevalier et alla comme la première s’aplatir contre le mur en face. Le chevalier ne bougea pas, seulement son sourire se changea en un rire caverneux, et son poignard entra un peu plus fortement dans la poitrine du maréchal. Celui-ci saisit son épée et en donna plusieurs coups dans la poitrine, le cœur, la tête du chevalier. L’épée entrait jusqu’à la garde et sans résistance, mais le chevalier ne tombait pas et riait toujours. « Je me rends, dit enfin le maréchal, je te reconnais esprit, pur esprit, contre lequel ma main et mon épée sont également impuissantes. Que veux-tu de moi ? Parle. — Obéiras-tu ? — J’obéirai, si tu ne me demandes rien de contraire à la loi de Dieu. — Oserais-tu me braver en me désobéissant ? Ne craindrais-tu pas ma colère ? — Je ne crains que Dieu, mon maître et le tien. — Je puis te tuer. — Tue-moi : si Dieu te donne pouvoir sur mon corps, il ne t’en donne pas sur mon âme, que je remets entre ses mains. » Et le maréchal ferma les yeux, fit un signe de croix et baisa l’étoile du Saint-Esprit qu’il portait toujours sur