Page:Ségur - Témoignages et souvenirs.djvu/130

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de s’en parer comme d’un vêtement d’honneur et de vouloir détruire dans son cœur la foi de toute sa vie, parce qu’il l’avait un moment oubliée. Il ne manqua jamais d’honorer Dieu par ses paroles et par ses actes ; il continua à prier pour demander au Seigneur de lui rendre la force qu’il avait momentanément perdue ; il continua d’aller à la messe le dimanche, observer même les autres commandements de l’Église, tels que le jeûne et l’abstinence. Et comme un de ses compagnons le raillait sur son obstination à ne rien prendre un jour de jeûne, il lui répondit en souriant : « Parce que j’ai la faiblesse d’offenser Dieu en un point, faut-il que je l’offense en tous les autres ? »

Grâce à cette fidélité courageuse, Hélion de Villeneuve n’eut point de peine à sortir du genre de vie où il avait posé le pied. Après un court enivrement, il secoua ce joug des plaisirs défendus, si pesants pour une âme chrétienne, comme on chasse un mauvais rêve après le sommeil, et, au premier avertissement de la Providence, il dit adieu au mal et rentra à pleine voile dans le port de la paix chrétienne.

C’était au mois de septembre 1850. Hélion de Villeneuve était à Paris, où les travaux du ministère le retenaient presque toute l’année, quand une lettre de sa mère lui apprit que son père était dangereusement malade et qu’il l’appelait près de lui. Cette fatale nouvelle le frappa comme un coup de foudre. Il accourut à Nancy et trouva son père encore vivant, mais condamné par les médecins. Ce bon père, ce noble et excellent chrétien, avait voulu attendre son fils pour être administré devant lui, et lui léguer ainsi, avec le souvenir de cette douloureuse mais sublime cérémonie, un dernier exemple et une dernière leçon.

Il vécut encore huit jours, pendant lesquels Hélion de