Page:Ségur - Un bon petit diable.djvu/29

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femme me rend méchant moi-même. C’est vrai, Juliette ; avec toi, je suis bon et je n’ai jamais envie de te jouer un tour ou de me fâcher ; avec ma cousine, je me sens mauvais et toujours prêt à m’emporter.

juliette.

C’est parce qu’elle n’est pas bonne, et que toi, tu n’as ni patience ni courage.

charles.

C’est facile à dire, patience ; je voudrais bien t’y voir ; toi qui es un ange de douceur et de bonté, tu te mettrais en fureur. »

Juliette sourit.

« J’espère que non, dit-elle.

charles.

Tu crois ça. Écoute ce qui m’arrive aujourd’hui depuis la première fois que je t’ai quittée ; à ma seconde visite, je ne t’ai rien dit parce que j’avais peur que tu ne me fisses rentrer chez moi tout de suite ; à présent j’ai le temps, puisque ma cousine dort, et tu vas tout savoir. »

Charles raconta fidèlement ce qui s’était passé entre lui, sa cousine et Betty.

« Comment veux-tu que je supporte ces reproches et ces injustices avec la patience d’un agneau qu’on égorge ?

— Je ne t’en demande pas tant, dit Juliette en souriant ; il y a trop loin de toi à l’agneau ; mais, Charles, écoute-moi. Ta cousine n’est pas bonne, je le sais et je l’avoue ; mais c’est une raison de plus pour la ménager et chercher à ne pas l’irriter.