Page:Sénèque - Œuvres complètes, Tome 3, édition Rozoir, 1832.djvu/379

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le stupide étonnement dont vous faites échange, vous affirmez que c’est un être divin. Voici que Socrate vous apparaît, du fond de cette prison qu’en y entrant il purifia, et qu’il rendit plus honnête que pas un sénat. Il vous crie d’une voix forte : « Quelle est cette frénésie ? Quelle est cette nature ennemie des dieux et des hommes ? Eh quoi ! diffamer les vertus ! et par de méchants discours violer les choses saintes ! Si vous le pouvez, louez les gens de bien ; sinon, passez votre chemin. Que s’il vous plaît de donner carrière à cette infâme licence, ruez-vous les uns sur les autres car, lorsque c’est contre le ciel que se déchaînent vos fureurs, je dis, non pas que vous commettez un sacrilège, mais que vous perdez votre peine. Moi, je fus jadis, pour Aristophane, un sujet de raillerie : toute cette poignée de poètes burlesques50 répandit sur moi ses sarcasmes empoisonnés51. Ma vertu fut illustrée par les moyens même que l’on employait pour l’assaillir : c’est que le grand jour et les épreuves lui conviennent. Nul ne comprend mieux combien elle est grande, que ceux qui ont senti ses forces en la provoquant. La dureté du caillou n’est mieux connue de personne, que de ceux qui le frappent. Je me présente comme un rocher, qui dans une mer semée d’écueils est laissé à découvert : les flots, de quelque côté qu’ils soient mis en mouvement, ne cessent de le battre ; mais cela ne fait pas qu’ils le déplacent, ou que par leurs attaques répétées pendant tant de siècles ils le détruisent. Donnez l’assaut, hâtez le choc : en vous supportant, je serai vainqueur. Contre les choses qui sont fermes et insurmontables, tout ce qui vient s’y attaquer n’emploie sa force, qu’à son détriment. Ainsi donc, cherchez quelque