I. À la Corse.
Corse, antique Cyrnos, que jadis cultiva
Des Phocéens errants la peuplade intrépide ;
Moindre que la Sardaigne et plus grande qu'Ilva,
Corse, riche en poissons, riche en cours d'eau limpide ;
Corse, climat terrible, aux étés dévorants1,
Où, lorsque Sirius ouvre ses yeux ardents,
Sous un ciel sans pitié l'homme épuisé succombe,
Épargne des bannis : car l'exil, c'est la tombe ;
Que ton sol soit léger à tous ces morts-vivants2.
II. Sur la même.
Une enceinte de rocs tout abrupte et sauvage ;
Au pied d'âpres coteaux de longs déserts maudits
Où ne rit au printemps nul gazon, nul ombrage ;
Des étés sans moissons, des automnes sans fruits !
Jamais, quand les frimas viennent blanchir ces plaines,
La liqueur de Pallas sous mon toit n'a brûlé ;
Ni pain, ni douce flamme au foyer, ni fontaines :
Qu'y trouver ? un exil ; qu'y voir ? un exilé.
III. Plainte.
Quand d'un homme égorgé tu fouilles la blessure,
Ami, tu ne crois pas assez grand son malheur !
Laisse en paix le vaincu : quelquefois sous l'injure
Un bras mort se ranime et perce le vainqueur.
- ↑ Toutes ces pièces ont été composées pendant l'exil de l'auteur en Corse. Voir notre notice sur Sénèque.