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THYESTE.

Marchons donc. Mais vous le voyez, ô mes enfans, je vous suis et ne vous conduis pas.

PLISTHÈNES.

Le ciel récompensera votre amour de père ; marchez d’un pas ferme et assuré.





Scène II.

ATRÉE, THYESTE, PLISTHÈNES ; le jeune TANTALE et le troisième fils de Thyeste, personnages muets.
ATRÉE.

La bête féroce est tombée dans le piège que je lui ai tendu. Le voici lui-même, et ses enfans que je hais à l’égal de leur père. Ma vengeance est de ce moment assurée ; Thyeste est en ma puissance, il y est tout entier. Je puis à peine me contenir moi-même et régler les mouvemens de ma colère. Semblable au chien généreux qui cherche la trace des bêtes, et, tenu en laisse, recueille les parfums semés sur leur passage : tant qu’il ne sent que de loin le sanglier, il obéit, et parcourt sans bruit tous les fourrés du bois ; mais quand il le sent approcher, il s’agite avec force, tous les muscles de son cou se tendent, il accuse par ses cris la lenteur de son maître, et rompt les liens dont on veut le retenir. Quand la haine respire l’odeur du sang, il faut qu’elle éclate. Cachons-la pourtant. — Comme son visage est pâle et défait ! quelle chevelure épaisse et confuse ! quelle barbe en désordre ! — Remplissons nos engagemens : j’ai du bonheur à vous