Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 2.pdf/23

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la victime, lorsque, la main haute, il s’apprêtait à frapper un coup sûr, le taureau aux cornes dorées tombe sans vie, sa tête s’ouvre sous le poids de la hache ; mais au- cun sang ne coule sur le fer sacré, et il ne sort de la blessure qu’une liqueur livide et noirâtre. Le coursier flecliit au. milieu de sa course, et renverse en tombant le cavalier qui le monte.

Les animaux abandonnés jonchent l’herbe des prairies, et le taureau languit au milieu de ses compagnons expirans. Le pasteur lui-même succombe, et voit de ses yeux mourans son trouPeau dévasté. Les cerfs ne m’ai- gnent plus les loups ravissans ; le lion a cessé de faire entendre son rugissement terrible, et le poil de l’ours ne se hérisse plus dans sa fureur ; le reptile, caché dans sa retraite obscure, perd l’âcreté de son poison, et meurt avec son venin fige dans ses veines. Dépouiller : de sa verte chevelure, la forêt ne projette plus d’ombre sur les montagnes, les plaines ont perdu leur parure de moissons naissantes, la vigne ne courbe plus ses bras chargés des présens de Bacchus.

Tout a ressenti les atteintes du mal qui nous consume ; les noires Euménid ; es-, armées de leurs torches infernales, ont brisé les portes de l’Érèbe ; le Phlége’thon a poussé le Styx hors de son lit, et mêlé ses eaux à celles de nos fleuves. La Mort, planant sur nous, ouvre sa bouche avide, et déploie toutes ses ailes ; le nautonnier qui, dans sa verte vieillesse, garde les passages du sombre