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son épouse, et se ménager avec elle un dernier entretien. Cet homme si fier ne l’a peut-être pas osé ; il pouvait sans aucun doute obtenir de son beau-père de reculer l’instant de mon départ funeste. On me laisse un jour pour embrasser mes enfants. C’est peu, mais je ne m’en plains pas, car j’aurai de reste le temps qu’il me faut ; ce jour, cet unique jour verra s’accomplir des choses qui feront l’entretien de tous les jours à venir. J’attaquerai les dieux mêmes, j’ébranlerai la nature entière.

La nourrice

Le malheur a troublé votre raison, princesse, calmez-vous, reprenez vos esprits égarés.

Médée

Je n’aurai de repos que quand j’aurai vu toute chose s’abîmer avec moi ; que tout l’univers périsse : il est doux de mourir en l’entraînant dans sa ruine.

La nourrice

Songez à tout ce que vous avez à craindre, si vous persistez dans ce fatal projet ; il n’y a point de sûreté possible à attaquer ceux qui ont la force entre leurs mains.


Scène II.

Jason, Médée.
Jason

Ô destinée cruelle, ô sort impitoyable, et toujours également cruel dans sa faveur et dans sa haine ! les dieux