Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 3.pdf/239

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à des pins, et les disperse, je ne ferai entendre aucun cri. Ni bêtes sauvages, ni armes, ni rien de ce qu’on peut repousser par la force, ne m’arracheront un gémissement.

Alcmène

Ce n’est pas un poison reçu de ton épouse qui te dévore ainsi, mais la suite de tes cruels travaux, et peut-être un mal affreux nourri dans ton sein par tes longues fatigues.

Hercule

Une maladie ? où est-elle ? y a-t-il encore quelque fléau sur la terre ? me voici ! qu’il paraisse. Qu’un ennemi prenne un arc en ses mains, mon bras désarmé suffira pour le vaincre ; qu’il s’avance, qu’il vienne !

Alcmène

Hélas ! l’excès de la douleur lui ôte le sens, et le met hors de lui-même. De grâce, éloignez ces armes, et retirez-lui ses flèches homicides. Ses yeux sanglants respirent le crime. Où fuir ? où cacher ma vieillesse ? cette douleur est une rage, une fureur qui le transporte.

Mais pourquoi fuir, et chercher un asile ? Alcmène est digne de mourir sous sa main puissante. Qu’elle périsse même par un crime, plutôt que de se voir condamner à la mort par quelque lâche, et qu’une main sans gloire triomphe de la mère d’Hercule. Mais, épuisé par l’excès des maux, le voilà qui s’endort ; sa respiration lourde soulève péniblement sa poitrine. O dieux ! j’implore votre assistance : si vous refusez à une malheureuse mère son glorieux fils, conservez du moins à la