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toire à celles qu’il avait remportées sur les bêtes féroces, et le feu compte maintenant parmi les travaux d’Hercule.

La Nourrice

Racontez-moi les détails de ce dernier triomphe.

Philoctète

À peine le triste cortège est-il arrivé au sommet de l’Œta, l’un dépouille le hêtre de son ombrage, et le coupe au pied ; un autre abat un pin sourcilleux qui monte vers le ciel, et le fait tomber du sein des nues : l’arbre immense ébranle les rochers dans sa chute, et entraîne avec lui d’autres arbres moins forts. Un chêne de Chaonie, qui autrefois rendit des oracles, étend au loin ses vastes rameaux ; l’épaisseur de son ombrage arrête le soleil, et ses branches surplombent toute la forêt qu’elles dominent. Nous le frappons à coups redoublés, il gémit sourdement sous la hache, et les coins se brisent dans ses flancs ; le fer s’émousse, il est blessé lui-même, et rejaillit du tronc : mais enfin l’arbre s’ébranle, il tombe avec une ruine épouvantable. A l’instant le soleil éclaire le vaste espace qu’il ombrageait : chassés de leurs retraites, les oiseaux s’élancent à la lumière du jour, et fatiguent leurs ailes à chercher, avec de grands cris, leurs asiles renversés. Tous les arbres sont tombés, les chênes sacrés eux-mêmes ont senti la hache, et leur antiquité n’en préserve aucun de ses atteintes.

Nous entassons tous ces débris, et les troncs posés deux à deux forment un bûcher qui s’élève jusqu’au ciel, mais trop petit encore pour Hercule. Nous disposons le pin, qui doit prendre feu le premier, le robuste chêne, et la petite yeuse ; nous recouvrons le tout de