Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 3.pdf/343

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rangues ; mais ils n’osaient pleurer la mort de leurs plus chers parents : il était défendu de gémir, quand la place publique était couverte de cadavres mutilés et tout souillés d’un sang noir et corrompu.

Mais le carnage et le meurtre ne s’arrêtèrent pas là. Long-temps les oiseaux et les bêtes féroces trouvèrent leur pâture dans les fatales plaines de Philippes. La mer de Sicile a englouti des flottes entières dans des combats où vainqueurs et vaincus étaient Romains. Ces grandes collisions ébranlaient le monde. Le rival d’Auguste prend la fuite, et ses vaisseaux fugitifs l’emportent vers le Nil, où il va bientôt périr. L’incestueuse Égypte s’abreuve une seconde fois du sang d’un capitaine romain, et possède les cendres de deux grands hommes.

Cette contrée fut le tombeau de la guerre civile, guerre si longue et si cruelle ; enfin le vainqueur fatigué put remettre dans le fourreau son glaive émoussé par tant de coups, et maintenir par la terreur l’empire qu’il avait conquis. Par ses armes et la fidélité de ses soldats, il assura sa propre vie. La noble piété de son fils le consacra dieu, après sa mort, et lui éleva des temples.

Et moi aussi le ciel sera mon partage, lorsque j’aurai détruit tous mes ennemis par l’épée, et qu’un héritier digne de moi assurera l’avenir de ma maison.

SÉNÈQUE.

Cet enfant d’une race divine, la fille d’un dieu vous le donnera ; nous l’attendons de la fille de Claude, qui est la gloire de sa famille et, comme Junon, l’épouse de son frère.