Page:Sénancour - Rêverie sur la nature primitive de l’homme, tome 2.djvu/181

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
fussent analysés par des hommes profonds en cela, comme
Dumarsais, Condillac et plusieurs autres à qui on ne
sauroit comparer les grammairiens utiles, mais vulgaires,
qui l’avoient étudiée jusqu’alors. Indépendamment des
améliorations que la langue a reçues dans la prose, ne
seroit-ce pas avoir beaucoup gagné que d’avoir seulement

[331]

acquis un plus grand nombre de | modèles et une
prépondérance bien plus grande en Europe ?
Ce n’est que dans le dix-huitième siècle que la France a
vraiment connu et perfectionné le genre descriptif, presqu’
entièrement ignoré des anciens. On peut en avoir
abusé ; mais, dans tous les genres, le mauvais périt, et une
grande partie de ce qui est bon subsiste et se perpétue.
Les compilations et les extraits sont trop multipliés ;
partout la vanité ou la cupidité répètent, sous toutes les
formes, ce qui obtient du succès : mais ces sortes de livres
étoient nécessaires. Sans doute en rendant les connoissances
faciles à acquérir, ils dispensent, jusqu’à un certain
point, de les approfondir ; mais il faut bien que ces
moyens diminuent les difficultés extrêmes qui résulteroient
de la complication des lumières. Les connoissances
littéraires ont participé au prodigieux accroissement des
sciences. Un jour s’approche où il sera impossible de puiser
dans les sources, de lire les originaux. Avant de faire
quelque chose, il est bon d’avoir une notion plus ou
moins précise de ce que les autres ont fait : mais déjà
parmi nous la vie suffit à peine pour s’en instruire. Les
Romains n’apprenoient que le grec : aujourd’hui il faut
lire les auteurs grecs, latins, italiens, françois, anglois,
allemands, et encore ne connoît-on alors que la littérature
vulgaire.
Le ton de la scène est devenu plus châtié, surtout dans

[332]

la comédie. Les plaisanteries grossières, les | expressions