Page:Sénancour - Rêverie sur la nature primitive de l’homme, tome 2.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
traire éclairer toute sa gloire. Mais quand l’autorité sait
être respectable, pourquoi maintiendroit-elle les préjugés
qui ne sont propres qu’à soutenir ce qui est injuste ou
odieux ? Dans les arts dont la vraie méthode est enfin
connue, conserve-t-on les procédés gothiques ? Quand la
science est intelligible, l’idiome des charlatans n’en
impose plus qu’à ces hommes pour qui c’est un besoin
d’être trompés. Il n’est qu’un moment pour tout ; les
efforts les plus ingénieux ne ramèneront pas les temps de
Charles IX. Le zèle de ces temps-là fut touchant ; mais,
avec moins de zèle, aujourd’hui les mœurs sont moins
atroces, les usages sont moins ridicules, les provinces
sont moins divisées, l’état est plus puissant, le Gouvernement
est plus respecté, les peuples sont plus heureux, et le
nom françois a plus de gloire. Pardonnez au siècle qui
prépara tant de prospérités, qui chercha, qui fit connoître,
qui fit aimer cette raison sur laquelle les institutions

[343]

actuelles fondent les grandes destinées que le | règne de
Louis XIV ne pouvoit produire. Ces déclamations contre
le siècle le plus universel dont nous puissions nous
applaudir, n’embarrasseront pas long-temps le cours de la
pensée : les esprits dociles à tous les genres de pédantisme
n’en seront pas arrêtés, par la raison que ceux-là
n’avancent jamais ; et, quant aux hommes d’un esprit
impartial, difficilement ils seroient séduits. Tout est à
découvert maintenant, il suffit de regarder pour voir ; et,
dans une question devenue si claire, il suffit de voir d’un
œil égal pour juger sainement. Seroit-ce le génie par qui
cette raison même a fait tant de choses, que vous prétendriez
abuser ? L’entreprise est grande ; eh messieurs ! vous
ne nous trompez-pas, comment le tromperiez-vous ?
Indifférent à vos disputes, bien instruit des motifs qui font
parler, travaillant à l’utile et sûr du vrai, il s’avancera