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SUR VART POÉTIQUE D’HORACE. 3oi

RÉPONSE AU PREMIER FACTUM.

MoHsnsra

Je ne répondrai point à l’éloge que M. de S* a voulu faire de moi. Sa politesse seule, etpeut-être un peu d’amour-propre, qui trouve toujours son compte à donner une idée avantageuse d’un adversaire dont on croit bientôt triompher, y ont plus de part que toute autre chose. Il me seroit fort aisé de confondre la modestie de son auteur par des louanges plus justes; mais il vaut mieux aller au fait. Sans étaler donc ici toutes les qualités de ma partie, que je vous prie même d’oublier pour un moment, je vais défendre Horace contre les insultes qu’on lui fait, en lui attribuant des choses qu’il n’a jamais pensées trop heureux de traiter cette question devant un juge comme vous, poli, délicat, et l’homme du monde le plus aisément blessé d’un faux raisonnement et d’une fausse conséquence. Je croyois avoir assez éclairci les paroles et le sens de ce poète dans mes Remarques sur sa Poétique 1; et j’avois voulu faire honneur à mes lecteurs, en supprimant des raisons que je les supposois capables de trouver d’eux-mêmes; mais je vois bien qu’en fait de langues anciennes et de critique sur les ouvrages des anciens, le plus sûr est de ne pas outrer la bonne opinion qu’on a de ceux à qui on s’adresse, qui sont rarement libres de préjugés.

Je vais donc m’expliquer avec plus d’étendue, non pas pour éclairer mon juge (je connois trop vos lumières), mais pour convaincre ma partie, et pour le disposer à reconnoftre la justice du jugement que j’espère que vous prononcerez contre lui. Je partage en deux points la question dont il s’agit.

Le premier est ce qu’Horace a dit; et le second, de ce qu’il a dû dire. 11 seroit difficile de décider lequel des deux est le plus opposé au sentiment de AI. de S* Après qu’Horace a parlé du choix du sujet, de l’ordre, des incidents et du style, il donne des préceptes pour les caractères qui sont le fondement du poËme dramatique aussi bien que du poème épique. Ces caractères sont de deux sortes ou inventés, ou connus. On n’a pas la liberté de changer les caractères connus, il faut nécessairement suivre ce que la renommée en a publié et ceux qui sont inventés doivent être propres, c’est-à-dire convenables; car c’est ce que signifie proprie dicere, comme je le prouverai. Dans les premiers, on ne doit chercher que la vraiseml. Voyez ci-dessus, p. 297, note 1.