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de la manière dont vous en êtes accablée, vous seriez fort à plaindre si cela étoit autrement. M. de Coulanges est bien en peine de savoir laquelle de vos Madames y prend goût : nous trouvons que c’est un bon signe pour elle ; car mon style est si négligé qu’il faut avoir un esprit naturel et du monde pour s’en pouvoir accommoder.

Je vous prie, ma bonne, ne vous fiez point aux deux lits ; c’est un sujet de tentation : faites coucher quelqu’un dans votre chambre. Sérieusement, ayez pitié de vous, de votre santé, et de la mienne.


Et vous, Monsieur le Comte, je verrai bien si vous me voulez en Provence : ne faites point de méchantes plaisanteries là-dessus. Ma fille n’est point éveillée, je vous réponds d’elle ; et pour vous, ne cherchez point noise. Songez aux affaires de votre province, ou bien je serai persuadée que je ne suis point votre bonne, et que vous voulez avoir la fin de la mère et de la fille.

Je reviens à vos affaires. C’est une cruelle chose que l’affaire du Roi soit si difficile à conclure. N’avez-vous point envoyé ici ? Si l’on vouloit vous remettre cinquante mille francs, comme à nous cent mille écus[1], vous auriez bientôt fini. Ce seroit un grand chagrin pour vous, si vous étiez obligé de finir l’Assemblée sans rien conclure : et vos propres affaires, je ne vois pas qu’il en soit nulle question. J’ai envoyé prier l’abbé de Grignan[2] de me venir voir,

  1. 11. Voyez la lettre du 19 août précédent, p. 327, et la Notice, p. 130.
  2. 12. Louis-Joseph Adhémar de Monteil de Grignan, le bel abbé, le plus beau des prélats, frère cadet du comte de Grignan. Il fut abbé de Saint-Hilaire de Carcassonne, et en 1675 agent général du clergé de France ; le 23 février 1680 il fut nommé évêque d’Évreux, et, avant d’avoir été canoniquement institué, transféré à Carcassonne, au