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gros du monde, ma pauvre bonne, cela est passé ; cette triste nouvelle n’a assommé que trois ou quatre jours ; la mort de Madame[1] dura bien plus longtemps. Les intérêts particuliers de chacun pour ce qui se passe à l’armée empêchent la grande application pour les malheurs d’autrui. Depuis ce premier combat, il n’a été question que de villes rendues et de députés qui viennent demander la grâce d’être reçus au nombre des sujets nouvellement conquis de Sa Majesté.

N’oubliez pas d’écrire un petit mot à la Troche, sur ce que son fils s’est distingué et a passé à la nage : on l’a loué devant le Roi, comme un des plus hardis. Il n’y a nulle apparence qu’on se défende contre une armée si victorieuse. Les François sont jolis assurément : il faut que tout leur cède pour les actions d’éclat et de témérité ; enfin il n’y a plus de rivière présentement qui serve de défense contre leur excessive valeur.

Si mes lettres sont perdues présentement, vous y perdez plus qu’en un autre temps.

Pourquoi croyez-vous que je ne parte que cet hiver ? Je prétends revenir en ce temps-là avec vous et M. de Grignan. Notre abbé a le courage de vouloir bien affronter les chaleurs ; je ne crains que pour lui. Ne nous empêchez point de partir par dire que vous ne nous attendez plus. Hélas ! il n’est plus question de ma pauvre tante ; nous lui avons rendu les derniers devoirs avec bien des larmes : dispensez-moi de lui faire tous vos compliments.

Je crois que nous mettrons la pauvre Mlle de la Trousse aux filles de la Croix qui sont au faubourg Saint-Antoine, et qui ne sont pas si suffisantes que nos sœurs[2]. La pauvre

  1. 6. Henriette-Anne d’Angleterre.
  2. 7. Les filles de la Visitation. — Sur les filles de la Croix, voyez tome I, p. 153, note 13.