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heureux succès de son voyage, il passera en Italie, pour faire voir que ce n’est pas pour les beaux yeux de Mme de Northumberland qu’il court le pays. Mandez-nous un peu ce que vous verrez de cette affaire, et comme quoi il sera traité.

La Marans est dans une dévotion et dans un esprit de douceur et de pénitence qui ne se peut comprendre : sa sœur[1], qui ne l’aime pas, en est surprise et charmée ; sa personne est changée à n’être pas connoissable : elle paroît soixante ans. Elle trouva mauvais que sa sœur m’eût conté ce qu’elle lui avoit dit sur cet enfant de M. de Longueville[2], et elle se plaignit aussi de moi de ce que je l’avois redonné au public ; mais des plaintes si douces, que Montalais en étoit confondue pour elle et pour moi, en sorte que pour m’excuser elle lui dit que j’étois informée de la belle opinion qu’elle avoit que j’aimois M. de Longueville. La Marans, avec une justice admirable, répondit que puisque je savois cela, elle s’étonnoit que je n’en eusse pas dit davantage, et que j’avois raison de me plaindre d’elle. On parla de Mme de Grignan ; elle en dit beaucoup de bien, mais sans aucune affectation. Elle ne voit plus qui que ce soit au monde, sans exception. Si Dieu fixe cette bonne tête là„ c’est un des grands miracles que j’aie jamais vus[3].

J’allai hier au Palais-Royal avec Mme de Monaco ; je m’y enrhumai à mourir ; j’y pleurai Madame[4] de tout mon cœur. Je fus surprise de l’esprit de celle-ci[5], non pas

  1. 6. Mlle de Montalais. Voyez la note 3 de la lettre 159.
  2. 7. Voyez sur cet enfant les lettres du 20 juin et du 8 juillet précédents. p. 118 et 143.
  3. 8. Voyez la lettre du 25 août (de Mme de Villars).
  4. 9. Madame Henriette d’Angleterre.
  5. 10. Élisabeth-Charlotte, fille de l’électeur palatin, seconde femme de Monsieur.