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que cela[1] durera toute ma vie. Les grands chagrins même en sont passés, et comme je vous ai déjà mandé, ma raison m’a rendu fort tranquille. Faites comme moi, Madame ; il vous est bien plus aisé, car le sujet de vos peines est fort au-dessous du mien. Si le Roi ne me continue ses grâces, ou que vous ne veniez bientôt ici, vous ne m’y trouverez plus. J’en serois bien fâché. Adieu.


1673

334. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

D’un petit chien de village, à six lieues de Lyon[2],
mercredi au soir, 11e octobre.

Me voici arrivée, ma fille, dans un lieu qui me feroit triste quand je ne le serois pas : il n’y a rien, c’est un désert. Je me suis égarée dans les champs pour chercher l’église ; j’ai trouvé un curé un peu sauvage, et un commis qui connoit Monsieur l’abbé, et qui m’a promis de vous faire tenir cette lettre. Quand je ne suis pas avec vous, mon unique divertissement est de vous écrire ; contez un peu cela au Coadjuteur pour lui faire venir des cornes à la tête.

Chamarande[3] est à une lieue d’ici ; il est seigneur de

  1. 4. Sur ce que sa persécution. (Manuscrit de l’Institut.) — La lettre finit dans ce manuscrit à « au-dessous du mien. »
  2. Lettre 334. — 1. « Ce village, d’après la distance qu’elle indique, doit être la petite ville d’Anse (dans le département du Rhône, à la hauteur de Trévoux, sur la rive droite de la Saône), fort ancienne et assez célèbre par les conciles qui s’y sont tenus. » (Walckenaer, tome V, p. 7.) — À deux lieues environ et à l’ouest, se trouve Bagnols, dont le château appartenait probablement au père de Mme de Coulanges. Mme de Sévigné l’avait-elle visité ? Voyez plus haut, p. 169, là note 2 de la lettre 306.
  3. 2. Clair Gilbert d’Ornayson, seigneur de Chamarande, mort en