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1674

368. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ ET D’EMMANUEL DE COULANGES À MADAME DE GRIGNAN.

À Paris, ce 8e janvier.
de madame de sévigné.

Je n’ai jamais vu de si aimables lettres que les vôtres, ma très-chère Comtesse ; je viens d’en lire une qui me charme. Je vous ai ouï dire que j’avois une manière de tourner les moindres choses ; vraiment, ma bonne, c’est bien vous qui l’avez : il y a cinq ou six endroits dans votre dernière lettre qui sont d’un éclat et d’un agrément qui ouvrent le cœur. Je ne sais par où commencer à vous y répondre.

Chauvigny[1] me vient le premier : je ne suis pas moins piquée que vous de la sottise qu’il a dite. Je le verrai peut-être chez M. de Pompone ; je lui en dirai et lui en ferai dire un petit mot. Il est vrai que cela impatiente de faire aussi bien que vous faites, et de rencontrer des sots en son chemin, qui vous confondent avec les malfaiteurs. Cela dégoûte de faire son devoir ; mais ce que je remarque en vous, c’est que cette injustice vous pique avec excès, et que tout aussitôt vous vous jetez dans les extrémités. Si jamais vous apportez ici cette sorte d’esprit, il y aura plaisir à vous mettre en colère. J’aime fort votre intendant et sa réponse au brouillon[2] ; elle est d’un homme droit et franc, ennemi de toute dissimulation,

Qui nomme un chat un chat et la Grêle[3] un fripon.

  1. Lettre 368 (revue en très-grande partie sur une ancienne copie). — 1. Est-ce César de Chauvigny (Chovigni), seigneur de Montespedon, mari de Claude, belle-sœur de Mme de la Fayette ?
  2. 2. Tel est le texte du manuscrit ; il s’agit sans doute de quelque brouillon de l’Assemblée, du parti de l’Évêque.
  3. 3. L’évêque de Marseille. Mme de Sévigné glisse cette malice dans ce vers bien connu de la Ire Satire de Boileau :

    J’appelle un chat un chat et Rollet un fripon.
    (Boileau, Satire I.)