Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 3.djvu/492

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 486 —

1675

n’a point prétendu le louer. Il m’a paru bon par toutes ces raisons : je vous l’envoie et vous prie de n’en donner aucune copie. On est si lassé de louanges en face, qu’il y a du ragoùt à pouvoir être assuré qu’on n’a pas eu dessein de vous faire plaisir, et que voilà ce qu’on dit, quand on dit la vérité toute nue, toute naïve.

On attend des nouvelles de Limbourg et d’Allemagne, cela tient tout le monde en inquiétude.

Adieu, ma chère fille ; votre portrait est aimable, on a envie de l’embrasser, tant il sort bien de la toile : j’admire de quoi je fais mon bonheur présentement.

J’embrasse M. de Grignan et suis à vous, ma bonne, avec cette tendresse que vous ne sauriez croire au point qu’elle est.

portrait du cardinal de retz.[1]

« Paul de Gondi, cardinal de Retz, a beaucoup d’élévation, d’étendue d’esprit, et plus d’ostentation que de vraie grandeur de courage. Il a une mémoire extraordinaire, plus de force que de politesse dans ses paroles ; l’humeur facile, de la docilité[2] et de la foiblesse à souffrir les plaintes et les reproches de ses amis ; peu de piété, quelques apparences de religion. Il paroît ambitieux sans l’être ; la vanité, et ceux qui l’ont conduit, lui

  1. 17.Comme ce portrait n’a été imprimé ni dans la Galerie des peintures, ni dans les Mémoires de Mademoiselle, où sont insérés la plupart des portraits qui furent faits dans ce temps-là, on a présumé que celui-ci seroit vu avec d’autant plus de plaisir, qu’il est fait de main de maître. (Note de Perrin, 1754.) — Nous avons suivi le texte de l’édition de 1754. Perrin n’avait pas inséré ce portrait dans sa première. — Voyez dans le tome Ides Mémoires de Retz d’autres portraits contemporains.
  2. 18. Mme de Sévigné, dans une lettre de 1679, dit à sa fille en parlant du cardinal de Retz : « Jamais je n’ai vu un cœur si aisé à gouverner. » Dans l’édition des Mémoires de Retz de M. Champollion-Figeac, on lit solidité, au lieu de docilité.