Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 3.djvu/509

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 503 —

1675


j’ai bonne opinion de lui de vous aimer. Pour moi, je me suis fait saigner pour l’amour de vous ; je m’en porte fort bien. Un médecin que j’ai vu chez Mme de la Fayette m’a priée de ne me point faire purger sitôt : il me donnera des pilules admirables : c’est le premier médecin de Madame[1], qui vaut mieux que tous les autres premiers médecins.

Mais à propos, vous attendez mon conseil pour aller voir Madame la Grande-Duchesse à Montélimar. M. de Grignan vous conseille d’y aller, et vous n’avez point d’équipage : je ne comprends pas trop bien comme il l’entend. Mon avis, c’est d’y aller tout doucement à pied ; je devine à peu près le parti que vous aurez pris, et je l’approuve. On l’attend ici comme une espèce de Colonne et de Mazarin[2], pour avoir quitté son mari[3] après quinze ans de séjour ; car pour les autres choses, on fait honneur à qui il est dû. Sa prison sera rude[4] ; mais elle croit qu’on l’adoucira. Je suis persuadée qu’elle aimeroit fort cette maison, qui n’est point à louer[5] : ah !

  1. 2. Le premier médecin de Madame était en 1675 le sieur Nicolas Lizot.
  2. 3. Sur ces deux nièces de Mazarin, voyez tome II, p. 84, note 2, et tome III, p. 116, note 15.
  3. 4. « Pour la folie d’avoir quitté son mari. » (Édition de 1754.)
  4. 5. « Après avoir proposé bien des couvents, le Grand-Duc agréa qu’elle vînt à Montmartre, dont Mme de Guise ma tante est abbesse… C’est une fille de grande vertu et de beaucoup de mérite ; et comme les religieuses n’oublient pas leur communauté, elle se trouva bien de la venue de ma sœur, Monsieur le Grand-Duc y ayant fait bâtir une maison fort belle, dont la moitié est en dedans, qui sera un très-bon logement pour l’abbesse quelque jour, et [l’autre] au dehors, fort commode, où logent ses gens, [avec] de beaux parloirs… Elle ne devoit sortir que pour aller voir le Roi, quand il lui commanderoit et l’enverroit querir dans l’un de ses carrosses. » (Mémoires de Mademoiselle, tome IV, p. 377, 521.)
  5. 6. Clagny ? le cœur du Roi ? « La Reine, dit Mademoiselle, m’a fait l’honneur de me dire que ma sœur (la grande-duchesse de Toscane)