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1672


cette marque de leur reconnoissance et de leur magnificence à l’éternité. L’assemblée étoit grande et belle, mais sans confusion. J’étois auprès de Monsieur de Tulle[1], de M. Colbert, de M. de Monmouth[2], beau comme du temps du Palais-Royal, qui, par parenthèse, s’en va à l’armée trouver le Roi. Il est venu un jeune Père de l’Oratoire pour faire l’oraison funèbre. J’ai dit à Monsieur de Tulle de le faire descendre, et de monter à sa place, et que rien ne pouvoit soutenir la beauté du spectacle et la perfection de la musique, que la force de son éloquence. Ma bonne, ce jeune homme a commencé en tremblant ; tout le monde trembloit aussi. Il a débuté par un accent provençal ; il est de Marseille ; il s’appelle Laisné[3] ; mais en sortant de son trouble, il est entré dans un chemin lumineux. Il a si bien établi son discours ; il a donné au défunt des louanges si mesurées ; il a passé par tous les endroits délicats avec tant d’adresse ;


    de Bellegarde (1612), qui l’avait fait reconstruire par du Cerceau. Le chancelier l’acheta en 1632, l’agrandit, et en fit décorer les galeries par Simon Vouet ; l’Académie y tint ses séances de 1643 à 1673, entre autres celle où assista Christine (1656). Il devint au siècle dernier l’hôtel des Fermes. Voyez une note de M. Chéruel dans le Journal d’Olivier d’Ormesson, tome I, p. CXIII.

  1. 7. Jules Mascaron, nommé à cet évêché en 1671.
  2. 8. Jacques, fils naturel de Charles II, roi d’Angleterre (et de Lucy Waters), et le même qui fut décapité le 15 juillet 1685. Il était né à Rotterdam, le 9 avril 1649, et porta jusqu’à la Restauration le nom de Jacques Crofts. Il avait été amoureux de Madame Henriette, sœur de son père, et avait si peu contenu le sentiment qu’il éprouvait pour elle, qu’on l’obligea de retourner en Angleterre.
  3. 9. Il naquit à Lucques (en 1633), et fut élevé à Marseille ; il se nommoit Vincent Léna. (En 1648 il entra, à Aix, dans la congrégation de l’Oratoire et prit le nom de Laisné.) Comme il seroit difficile de rien ajouter à l’éloge que fait ici Mme de Sévigné de ce jeune orateur, il suffira de dire qu’il mourut à l’âge de quarante-quatre ans (en 1677), et que la délicatesse de sa santé ne lui ayant point permis de continuer les fonctions pénibles de la chaire, il s’étoit borné à