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1675que M. de Louvois lui continuera ses aimables distinctions en lui faisant donner de l’argent pour monter à l’enseigne[1] ; c’est bien pis que les neuf cents lieues[2] : mais que faire ? C’est cela qui rend son voyage incertain[3].

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467. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ
À MADAME DE GRIGNAN.
Aux Rochers, mercredi 13e novembre.

Les voilà toutes deux, ma très-chère ; il me paroît que je les aurois reçues réglément comme à l’ordinaire, sans que Rippert m’a retardée d’un jour par son voyage de Versailles. Quelque goût que vous ayez pour mes lettres, elles ne peuvent jamais vous être ce que les vôtres me sont ; et puisque Dieu veut qu’elles soient présentement ma seule consolation, je suis heureuse d’y être très-sensible ; mais en vérité, ma fille, il est douloureux d’en recevoir si longtemps, et cependant la vie se passe sans jouir d’une présence si chère : je ne puis m’accoutumer à cette dureté ; toutes mes pensées et toutes mes rêveries en sont noircies ; il me faudroit un courage que je n’ai pas pour m’accoutumer à cette extraordinaire destinée[4].

  1. Dans l’édition de 1754 : « en lui faisant acheter l’enseigne pour y monter. »
  2. Voyez tome II, p. 135.
  3. Dans l’édition de 1818, la lettre se termine par la phrase suivante, que nous ne trouvons dans aucune des éditions antérieures et dont nous ne savons pas la source : « Adieu, ma très-aimable, je vous embrasse avec une tendresse qui est, ce me semble, au point de la perfection : plût à Dieu vous le pouvoir témoigner comme je le sens ! »
  4. LETTRE 467 (revue en très-grande partie sur une ancienne copie). — Dans l’édition de 1754 : « pour m’accommoder d’une si extraordinaire destinée. »