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1676M. de Turenne sur sa Pie[1] : c’est la plus belle chose du monde. Le cardinal de Bouillon étoit venu me voir pour me prier, toutes choses cessantes, d’aller voir le lendemain ce chef-d’œuvre ; car Mignard a pris la parfaite ressemblance plus dans son imagination que dans les crayons qu’on lui a donnés.

J’ai encore entretenu deux heures M. du Perrier ; je ne finis point sur la Provence ; je lui fais conter mille choses de vous qui me font plaisir, et de votre jeu, et de votre opéra où vous rêviez si bien ; enfin, je vous reconnois, ma très-chère, mais je suis bien fâchée que M. de Grignan et vous perdiez toujours tout ce que vous jouez. Je me suis fait reconter toutes les pétoffes des procureurs du pays, et comme vous avez redonné la paix à la Provence, et du premier président, et de la Tour d’Aigues[2] et de mille autres choses. Enfin, j’ai rafraîchi ma mémoire de tout ce que vingt-deux jours de fièvre m’avoient un peu effacé ; car vous savez que j’étois sujette à de si grandes rêveries, qu’elles me confondoient souvent les vérités.

    note du tome 1, il pourrait bien se faire, comme l’a dit M. Ed. Fournier dans un article récent, que le mot Cours dût également s’entendre du cours Saint-Antoine, dont Mme de Sévigné était voisine comme habitante du Marais.

  1. Le cheval de bataille de M. de Turenne, et celui qu’il montoit le jour qu’il fut tué. (Note de Perrin.) — Langlade raconte dans les Mémoires du duc de Bouillon, p. 257, que les soldats de Turenne, voyant que les officiers généraux qui commandaient l’armée, délibéraient longtemps sur le poste que l’on devait prendre, s’écrièrent tout d’une voix : « Les voilà bien empêchés, ils n’ont qu’à lâcher la Pie, et là où ce pauvre cheval s’arrêtera, c’est là qu’il faudra camper. »
  2. C’était un magnifique château situé à peu de distance d’Aix. Il a été rasé pendant la Révolution. (Note de l’édition de 1818.) — Il y a un lieu de ce nom dans l’arrondissement d’Apt, canton de Pertuis.