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1676ment vous trouveriez mon carrosse à Briare, qui vous amèneroit ici. Ce seroit un temps admirable pour être ensemble. Vous y attendriez M. de Grignan qui vous amèneroit votre équipage, et que vous auriez le plaisir de recevoir. Nous aurions cette petite avance, qui me donneroit une grande joie, et qui vous épargneroit d’extrêmes fatigues, et à moi toute l’inquiétude que j’en ressens.

Répondez-moi, ma très-chère, sur cette proposition, qui me paroît si raisonnable[1] , et parlons cependant de Villebrune[2] : je n’ai jamais été plus surprise que de le voir à Grignan[3]. Je suis assurée que vous l’avez bien questionné sur ma maladie ; il a pu vous la dire d’un bout à l’autre. Il m’envoie d’une poudre admirable ; vous en a-t-il dit la composition ? je n’en prendrai pourtant qu’au mois de septembre. Il se loue fort de vos honnêtetés ; je crois qu’il avoit un bon passe-port en parlant de moi. J’admire comme le hasard vous a envoyé cet homme pour figurer avec mon capucin de Vichy[4]. Pour moi, je lui trouve bien de l’esprit, et un talent admirable pour la médecine : c’est pour s’y perfectionner encore qu’il est allé à Montpellier. Il a eu de grandes conversations avec M. de Vardes sur l’or potable[5]. Il est fort estimé dans notre Bretagne ; il y a

  1. « Qui doit vous paroître aussi raisonnable qu’à moi. » (Édition de 1754.)
  2. Le médecin qui avait soigné Mme de Sévigné aux Rochers l’hiver précédent. Voyez la lettre suivante, p. 512 et 513.
  3. « Que d’apprendre qu’il étoit Grignan. » (Édition de 1754.)
  4. Voyez ci-dessus la lettre du 11 juin, p. 485.
  5. Voici en quels termes Furetière dans son Dictionnaire universel (1690) parle de l’or potable : « Les chymistes appellent or potable, une médecine faite du corps même de l’or, et réduite sans aucun corrosif en une gomme ou substance semblable au miel et de couleur de sang. Cette gomme détrempée avec de l’esprit du vin acquiert une couleur de rubis et s’appelle teinture d’or. Une once de