Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/308

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1677 ne songez à rien qui vous chagrine[1] ; cherchez tout ce qui vous pourra plaire, et ne vous imaginez pas qu’il y ait rien dans la vie qui ne se puisse faire[2] : le monde est joli, et on trouve toujours quand on cherche. Voici un sentiment qui ne sera pas de votre goût ; mais je m’entends bien ; je ne parle pas si improprement que vous pourriez croire.


de madame de sévigné.

Il est très-sage, cet homme-ci ; cependant je lui disois tantôt, le voyant éveillé comme une potée de souris : « Mon pauvre Monsieur, il est encore bien matin pour se coucher, vous êtes encore bien vert, mon ami ; il y a bien du vieil homme, c’est-à-dire du jeune homme[3] en vous. » Je m’en vais tout dire. Il ne faisoit l’autre jour qu’une légère collation, car il voudroit faire pénitence, et il en a besoin ; il m’échappe de l’appeler « Monsieur de Grignan » (ce nom se trouve naturellement au bout de ma langue) : il s’écria d’un ton qui venoit du fond de l’âme : « Eh ! plût à Dieu ! » Je le regardai, et je lui dis : « J’aimerois autant souper. » Nous nous entendîmes ; nous rîmes extrêmement : dis-je vrai ? Répondez.


du comte de guitaut.

Vous[4] ne ferez jamais taire Madame votre mère. Vous

  1. 5. L’édition de 1754 n’a que ce second membre de phrase : « ne songez cependant à rien qui vous chagrine. »
  2. . 6. « Qu’il n’y ait rien dans la vie qui puisse avoir ce droit-là. » (Édition de 17S4.) »
  3. 7. Le manuscrit porte : « de jeune homme. »
  4. 8. Tout cet alinéa est ainsi défiguré dans l’édition de 1754 : « II est vrai, Madame, que les souhaits vont quelquefois bien loin, et qu’il n’est pas toujours fort aisé d’en être le maître. Vous êtes informée de ma pénitence, si vous ne l’êtes de mes péchés ; mais