Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/148

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1679 Buron[1] : je me doutois bien de cette belle conduite. Il me parle fort de son cher pigeon, et vous aime beaucoup mieux, dit-il, que toutes ses maîtresses ; je ne sais si vous devez être contente. Soyez-le du moins de Mme de la Fayette, qui m’a tantôt parlé de vous et du goût qu’elle trouveroit à vous pouvoir être bonne à quelque chose, d’une manière à l’embrasser[2]. Nous saurons bientôt ceux qui sont nommés pour Madame la Dauphine : c’est en recevant ce dernier courrier[3] qu’on les déclarera. Il y en a qui disent que Mme de Maintenon sera placée d’une manière à surprendre ; ce ne sera pas à cause de Quanto, car c’est la plus belle haine de nos jours ; elle n’a vraiment besoin de personne que de son bon esprit.

Vraiment vous me faites pitié[4] de nous demander des oranges : c’est une étrange dégradation que de les voir gelées en Provence ; au moins le soleil ne l’est pas ; vous me parlez d’une douceur du mois de mai qui me console. J’ai vu Mlle de Méri ; elle a fait l’effort de venir voir ce joli appartement[5] : il ne lui plaît pas ; c’est un malheur. Elle est toujours très-languissante ; les agitations de son petit ménage sont sans fin ; je n’eusse jamais cru qu’une telle bagatelle eût pu l’occuper si uniquement. M et Mme de Mesmes sortent d’ici ; ils ont recommencé sur nouveaux frais à parler de vous et de Grignan avec entêtement : votre bonne maison et vos beaux titres, Pauline et ses charmes, votre musique, votre terrasse, votre politesse, qui me fait croire une paysanne en comparaison

  1. 16. Il y faisait abattre de beaux bois, que Mme de Sévigné regretta fort. Voyez la lettre du 27 mai suivant.
  2. 17. Dans le texte de 1754, on lit simplement : « qui m’a tantôt parlé de vous d’une manière à l’embrasser. »
  3. 18. « C’est à l’arrivée de ce dernier courrier. » (Édition de 1754.)
  4. 19. « Vous me faites pitié, en vérité. » (Ibidem.)
  5. 20. Voyez la lettre du 1er décembre précédent, p. 115 et 116.