Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/241

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1680 alliez-vous si souvent chez cette Voisin ? — C’est que je voulois voir les sibylles qu’elle m’avoit promises ; cette compagnie méritoit bien qu’on fît tous les pas. » Si elle n’avoit pas montré[1] à cette femme un sac d’argent ? Elle dit que non, par plus d’une raison, et tout cela d’un air fort riant et fort dédaigneux. « Eh bien Messieurs, est-ce là tout ce que vous avez à me dire ? — Oui, Madame. » Elle se lève, et en sortant, elle dit tout haut : « Vraiment, je n’eusse jamais cru que des hommes sages pussent demander tant de sottises. » Elle fut reçue de tous ses amis, parents et amies[2] avec adoration, tant elle étoit jolie, naïve, naturelle, hardie, et d’un bon air, et d’un esprit tranquille.

Pour la Tingry, elle n’étoit pas si gaillarde. M. de Luxembourg est entièrement déconfit : ce n’est pas un homme, ni un petit homme, ce n’est pas même une femme, c’est une petite femmelette[3]. « Fermez cette fenêtre ; allumez du feu ; donnez-moi du chocolat ; donnez-


    première fois, et ledit le Sage ayant dit qu’il le feroit retrouver aussi bien que l’autre, il se retira, et elle répondante envoya depuis plusieurs fois chez ledit le Sage, et y passa elle-même. Mais ledit le Sage, après plusieurs excuses, vint trois ou quatre jours après chez elle répondante, où il lui dit que les sibylles étoient empêchées, et qu’il n’avoit pas pu lui rendre réponse ; depuis ce temps-là, elle répondante n’a pas vu ledit le Sage, et elle trouva la chose si ridicule qu’elle la récita à plusieurs personnes, et l’écrivit même à M. le duc de Bouillon, son mari, qui étoit à l’armée. — Interrogée s’il n’est pas vrai qu’elle écrivit un billet qu’elle mit entre les mains dudit le Sage, et qui fut cacheté pour être brûlé, dans lequel elle demandoit la mort de M. de Bouillon, son mari ? a dit que non, et que la chose est si étrange, qu’elle se détruit d’elle-même. » (Copié sur la minute signée : Marianne de Mancini, duchesse de Bouillon, Bazin, et de la Reynie.) (Note de l’édition de 1818.)

  1. 35. « N’avez-vous pas montré. » (Édition de 1754.)35. « N’avez-vous pas montré. » (Édition de 1754.)
  2. 36. « De tous ses parents, amis et amies. » (Ibidem.)
  3. 37. « Une vraie femmelette. » (Ibidem.)