Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/297

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1680 nête homme, est mort de maladie, comme il les alloit tous plaider ; sa mort réjouit tout le monde ; il me semble qu’on n’a point accoutumé de mourir, quand tant de gens le souhaitent. Le grand maître[1] se rétablit doucement à Saint-Germain ; nos inquiétudes pour son mal ont été selon nos dates : moi beaucoup, Mme de Coulanges un peu plus, et d’autres mille fois davantage. Il est vrai que l’on jouoit si bien, et l’on cachoit cette tristesse si habilement, qu’elle ne paroissoit point du tout ; et l’on se livroit, pour mieux tromper, au martyre insupportable d’être à la cour, d’être belle et parée ; en un mot, il n’y paroissoit pas, non plus qu’à cette dévotion dont vous parliez un jour si follement à Mlle de Lestrange[2]. On dit pourtant qu’il y avoit des pleurs nocturnes essuyés par la pauvre K**[3], qui se cassoit la tête contre les murs, et faisoit très-bien le devoir, tambour battant, d’une véritable amie. Nous y avons été trois fois ; je ne veux point vous cacher deux visites ; il suffit que j’aie perdu la mémoire entière du passé[4].

Adieu, ma très-chère : dépêchez de vous divertir ; nous n’irons pas si vite, si nous allons à Livry. Quoi que vous disiez de vos soupers, j’en ai fort bonne opinion, je les connois.

  1. 13. Le duc du Lude.
  2. 14. Voyez tome III, p. 225, note 6.
  3. 15. La marquise de Kerman. Voyez tome II, p. 288, note 3.
  4. 16. Voyez la Notice, p. 60.