Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/485

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1680 Cette femme est une espèce de beauté que vous avez vue une fois à Paris ; elle a un amant à bride abattue ; elle est deux ou trois mois chez lui ; elle s’en va à Paris, à Bourbon, familièrement avec lui ; elle va partout avec son équipage[1] ; elle est présentement ici, avec six beaux chevaux gris, qui sont à Monsieur le Marquis ; c’est aussi le cocher de Monsieur le Marquis et son carrosse[2] : elle en parle sans fin et sans cesse. Elle n’est pas souvent chez son mari, dont les terres sont en décret[3] ; car votre cousin s’est ruiné, comme un sot, dans son château. Cette femme n’a point d’affaires ; elle ne cherche[4] qu’à faire des visites ; elle vient de vingt lieues loin, et tombe ici, comme une bombe, à l’heure que j’y pense le moins. D’abord me voilà à me cacher dans ces bois, comme vous savez, pour différer mon martyre ; enfin il faut revenir ; je trouve[5] cette grande et belle femme, que je ne connois quasi point, avec une troupe à peu près comme celle de Mme  de Chevigny[6] à Fresnes, une petite fille, une demoiselle toute bouclée (c’est la huguenote), une autre guimbarde. Je me mets d’abord dans les belles humeurs[7] de dire, malgré moi, des rudesses, une

  1. 33. « Familièrement avec lui, et partout avec son équipage. » (Édition de 1754.)
  2. 34. « C’est aussi le cocher et le carrosse de Monsieur le Marquis. » (Ibidem.) — Voyez la lettre du 26 juin, p. 486, note 7.
  3. 35. Une terre est en décret, lorsqu’on en poursuit l’adjudication. Voyez le Dictionnaire de Furetière, au mot Décret.
  4. 36. « Cette femme, qui n’a point d’affaires, ne cherche, etc. » (Édition de 1754.)
  5. 37. Il fallut… je trouvai. » (Ibidem.)
  6. 38. « Qui ressembloit à celle de Mme  de Chevigny. » (Ibidem.) — Paule de la Rivière, fille unique d’Humbert, baron de la Rivière, et de Claude de Pradine. Elle avait épousé, le 31 janvier 1665, François de Choiseul, comte de Chevigny, qui vivait encore, avec elle, au mois de mars 1691, et dont elle eut huit enfants.
  7. 39. «  « Me voilà d’abord dans ces belles humeurs. » (Édition de 1754.)