Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/84

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1679 ouvriroit les pores dans le lieu d’où les sérosités partent, et que vous en seriez soulagée. Il vous loue d’avoir quitté votre vieux lait ; il vous conseille de prendre, à la place du lait, qui vous est contraire, bien des orges, des bouillons de poulet avec des semences froides ; car si vous ne corrigez ce sang, vous en devez craindre des suites fâcheuses. Il vous conjure très-instamment de ne pas négliger l’eau de Sainte-Reine, et dit que vous savez bien ce que c’est. Cet article a été recommencé jusqu’à trois ou quatre fois. Du Chesne croit aussi que le café précipite votre sang, qu’il l’échauffe, qu’il peut être bon à des gens qui n’ont mal qu’à la poitrine ; mais que jamais il ne s’est ordonné dans la disposition où vous êtes, et qu’on en peut juger par votre maigreur, qui augmente à mesure que vous en prenez ; qu’il est à craindre que vous ne vous en aperceviez trop tard ; que la force que vous croyez que le café vous donne n’est qu’un faux bien, puisque cela vient du mouvement de votre sang, qui auroit besoin, au contraire, d’être calmé et adouci. Songez-y, ma fille, je ne fais précisément que vous répéter ce que du Chesne m’a dit avec beaucoup d’intérêt et d’amitié pour vous. Vous trouverez peut-être bien de l’ennui dans un si grand article ; mais le moyen de le supprimer ? Mettez-vous à ma place, et voyez ce que je puis sentir et ce que je puis craindre. Vous aimez du Chesne : voilà ses avis, et ce qu’il m’a fait promettre de vous mander.

Vous êtes donc à Lambesc, ma chère enfant : une plus grande gloire vous a appelée plus avant en Provence. Je crains bien pour vous l’excès des compliments et des visites ; vous n’êtes guère en état de suffire à tout cela. On ne parle point du voyage du Roi dans les provinces, non plus que des cordons bleus : Sa Majesté n’en veut point faire, à cause de l’infinité de préten-