Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/545

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vie. Je ne sais, ma bonne, si vous ne vous moquerez point de moi, de vous envoyer des détails que notre Troche m’écrit et qu’elle prend en très-bon lieu. Il y a des gens qui les méprisent; pour moi, comme je les aime fort, je hasarde de vous plaire ou de vous ennuyer. Mais non, car vous n’aurez qu’à les jeter, s’ils vous ennuient. La mort de Villarceaux vous fera pitié[1] , et la consolation de Mme de Polignac à sa compagne vous fera rire, et vous reconnoîtrez aisément cette vivacité[2] qui se veut divertir un petit brin, pendant qu’elle est jeune. Vous verrez ce qu’a dit Sa Majesté. On sait les grandes choses et l’on ignore les petites en voilà à choisir.

Ce que vous me mandez de ces galères qui sont devenues des sirènes, c’est-à-dire des chimères, comme dans Virgile[3] m’a fait plaisir. Je vous envoie le petit Bigorre[4] pour le plaisir des heureux augures. Vous y verrez toutes ces vues qui commencent à se démêler, et il m’entraîne à espérer que Rome, Savoie et la mer se termineront selon nos désirs. Cette Savoie me tient bien au cœur, par rapport à vous et à votre époux[5]

Ma très-chère bonne, je crois que votre enfant a besoin de ce qu’il vous demande; la difficulté c’est de lui pouvoir donner. Votre état est une mer où je m’abîme, et qui me fait peur pour votre santé. Quand j’y compare mes affaires réduites au petit pied, je crois regarder par un microscope, et je me crois riche, et ne songe plus à moi.

  1. 11. Voyez la Cazette, p. 335, et ci-après, p. 553, la lettre de Bussy du 16 juillet suivant.
  2. 12. Dans les éditions antérieures « cette vivante. »
  3. 13. Voyez l'Enèïde de Virgile, livre X, vers 215-235.
  4. 14. Le petit billet de l’abbé Bigorre, les nouvelles à la main qu’il envoyait à ses amis. Voyez ci-dessus le second alinéa de la lettre du 28 décembre précédent, p. 375, et p. 329, note 15.
  5. 15. Voyez ci-après, p. 547, le commencement de la lettre de juillet.