Page:Sade - Adresse d’un citoyen de Paris au roi des Français, 1791.djvu/9

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siblement replacée sur votre front. Elle va l’être encore, Sire, et l’on vous la rendra plus belle, plus digne du vrai Monarque d’une Nation telle que la nôtre ; c’est vous qui régnerez, ce ne seront plus vos Ministres ; vous régnerez par la loi, par le cœur de vos sujets. Oh ! quel plus bel Empire ! Vous vouliez le perdre, Sire, vous vouliez le perdre en nous fuyant ! Et quel motif pouvoit vous engager à une telle conduite ? Permettez-nous de les discuter une minute ; étoit-ce comme émigrant que vous sortiez de France ? Prétendiez-vous aller végéter en particulier dans quelque coin obscur de l’Europe ? Dans cette supposition, quelle faiblesse ! Vouliez-vous rentrer en France les armes à la main et regagner Versailles sur des monceaux de morts ; sous ce rapport que de cruautés, que de sang votre main auroit répandu ! Car n’en doutez pas. Sire, il n’est pas un seul Français, tous parlent ici par ma bouche, pas un seul qui n’eût préféré la mort à la renaissance des abus de votre ancien despotisme. Vous les en avez lassés, que dis-je, vous les en avez écrasés ; ils n’en veulent plus : l’honneur y tient d’ailleurs, et vous savez que l’honneur est le sentiment le plus actif dans le cœur de l’homme et sur-tout dans celui des Français.

De quel œil, grand Dieu ! nous verroient les Nations de la terre dont nous fixons tous les regards, si nous faiblissions maintenant ! nous en deviendrions à la fois et la fable et le jouet ; non Sire, nous ne foiblirons pas, nous ne le pouvons point. Si vous voulez régner que ce soit sur une Nation libre ; c’est elle qui vous installe ; qui vous nomme son chef ; c’est elle qui vous place sur son trône, et non pas le Dieu de l’Univers comme on avoit la faiblesse de le croire