Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/357

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l’esprit, vous puissiez me faire une telle demande : ignorez-vous que la prison, la plus mauvaise et la plus dangereuse des punitions, n’est qu’un ancien abus de la justice, qu’érigèrent ensuite en coutume le despotisme et la tyrannie ? La nécessité d’avoir sous la main celui qu’il fallait juger, inventa naturellement, d’abord des fers, que la barbarie conserva, et cette atrocité, comme tous les actes de rigueur possibles, naquit au sein de l’ignorance et de l’aveuglement : des juges ineptes, n’osant ni condamner, ni absoudre dans certains cas, préférèrent à laisser l’accusé garder la prison, et crurent par là leur conscience dégagée, puisqu’ils ne faisaient pas perdre la vie à cet homme, et qu’ils ne le rendaient pas à la société ; le procédé en était-il moins absurde ? Si un homme est coupable, il faut lui faire subir son jugement ; s’il est innocent, il faut l’absoudre : toute opération faite entre ces deux points ne peut qu’être vicieuse et fausse. Une seule excuse resterait aux