Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/402

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On me raconta dans mes voyages l’action d’un juge de votre Patrie, dont j’ai long-tems frémi. Il fit, m’assura-t-on, enlever le coupable qu’il avait condamné, quinze ans après le jugement ; ce malheureux, trouvé dans son asyle, était devenu un saint ; le juge barbare ne le fit pas moins traîner au supplice… et je me dis que ce juge était un scélérat qui aurait mérité une mort trois fois plus douloureuse que cette victime infortunée. Je me dis, que si le hasard le faisait prospérer, la Providence le culbuterait bientôt, et ce que je m’étais dit devint une prophétie : cet homme a été l’horreur et l’exécration des Français ; trop heureux d’avoir conservé la vie qu’il avait cent fois mérité de perdre par une multitude de prévarications et d’autres horreurs aisées à présumer d’un monstre capable de celle que je cite, et dont la plus éclatante était d’avoir trahi l’État[1].

  1. Zamé pèche ici contre l’ordre du tems ; nous sommes nécessairement obligés d’en prévenir nos lecteurs ; il ne peut parler que des