Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/438

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Nous avions près de nous une très-jolie femme, dont je remarquai que les traits s’altéraient à mesure que l’intrigue avançait ; tour-à-tour elle rougissait, elle pâlissait, sa gorge palpitait,… sa respiration devenait pressée ; enfin les larmes coulèrent, et peu-à-peu sa douleur augmenta à un tel point, les efforts qu’elle fit pour se contenir l’affectérent si vivement, que n’y pouvant plus résister,… elle se lève, donne des marques publiques de désespoir, s’arrache les cheveux et disparaît.

Eh bien ! me dit Zamé, qui n’avait rien perdu de cette scène ; eh bien ! croyez-vous que la leçon agisse ? Voilà les seules punitions nécessaires à un peuple sensible. Une femme également coupable, eût affronté le public en France : à peine se fut-elle doutée de ce qu’on lui adressait. À Siam on l’eût livrée à un éléphant. La tolérance de l’une de ces nations, sur un crime de cette nature, n’est-elle pas aussi dangereuse que la barbare sévérité de l’autre, et ne trouvez-vous pas ma leçon meilleure ?