Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/478

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de te retrouver un jour, voilà de quoi enrichir le faible don de ma main, de quoi satisfaire à tous tes desirs, de quoi me procurer le charme de les prévenir tous ; mais que les calculs de l’homme sont incertains, quand il ne les soumet pas aux caprices du sort ! Ô Léonore ! Léonore, dit Sainville en s’interrompant et se jettant en pleurs sur le sein de sa chère femme, j’avais ce qu’il fallait pour ta fortune, tout ce qui pouvait te dédommager de tes souffrances, et je n’ai plus à t’offrir que mon cœur. Ciel, dit madame de Blamont, cette grande richesse ?… — Elle est perdue pour moi, Madame ; différence essentielle entre les sentimens du cœur et les biens du hasard ; ceux-ci se sont évanouis, et la tendresse, que je dois à celui de qui je les tenais, ne s’effacera jamais de mon ame ; mais reprenons le fil des événemens.

Quoiqu’il me restât encore près de vingt-cinq mille livres, dont moitié en or, heureusement cousus dans une ceinture qui ne me quitta jamais, j’eus la fantaisie de me