Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/58

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étions dans une saison où ces parages sont incertains ; le tems était affreux ; nous attendîmes. Je crus inutile de paraître davantage chez le Ministre de France… Que lui dire ? Peut-être même le servais-je en n’y reparaissant plus. Le ciel s’éclaircit enfin, et nous nous mîmes en mer ; mais ce calme n’était que trompeur : la mer ressemble à la fortune, il ne faut jamais se défier autant d’elle, que quand elle nous rit le plus.

À peine eûmes-nous quitté l’Archipel, qu’un vent impétueux troublant la manœuvre des rames, nous contraignit à faire de la voile ; la légèreté du bâtiment le rendit bientôt le jouet de la tempête, et nous fûmes trop heureux de toucher Malte le lendemain sans accident. Nous entrâmes sous le fort Saint-Elme dans le bassin de la Valette, ville bâtie par le Commandeur de ce nom en 1566. Si j’avais pu penser à autre chose qu’à Léonore, j’aurais sans doute remarqué la beauté des fortifications de cette place, que l’art et la nature rendent