Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/76

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vironnait, m’avertirent enfin qu’il était temps de poursuivre, et je le fis, toujours avec le même projet de route. Mais la faim me pressait encore, et je ne trouvais plus rien, pour la satisfaire. Ô viles richesses, me dis-je alors, m’apercevant que j’en étais couvert, sans pouvoir me procurer avec, le plus faible secours de la vie !… quelques légers légumes, dont je verrais cette plaine semée, ne seraient-ils pas préférables à vous ? Il est donc faux que vous soyez réellement estimables, et celui qui, pour aller vous arracher du sein de la terre, abandonne le sol bien plus propice qui le nourrirait sans autant de peine, n’est qu’un extravagant bien digne de mépris. Ridicules conventions humaines, que de semblables erreurs vous admettez ainsi, sans oser les replonger dans le néant, dont jamais elles n’eussent dû sortir.

À peine eus-je fait cinq lieues, cette seconde journée, que je vis beaucoup de monde devant moi. Ayant un extrême be-