Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/80

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dait de mon courage, je me fis violence, je surmontai cet instant de faiblesse, et me contins.

La journée tout entière se passa à ces exécrables cérémonies ; et c’est sans doute une des plus cruelles que j’aie passées de mes jours. Enfin nos gens partirent au coucher du soleil, et au bout d’un quart-d’heure, ne les apercevant plus, je descendis de mon arbre, pour prendre moi-même un peu de nourriture, que l’abattement dans lequel j’étais, me rendait presqu’indispensable.

Assurément, si j’avais eu le même goût que ce peuple féroce, j’aurais encore trouvé sur l’arêne, de quoi faire un excellent repas ; mais une telle idée, quelque fut ma disette, fit naître en moi tant d’horreur, que je ne voulus même pas cueillir les racines, dont je me nourrissais, dans les environs de cet horrible endroit ; je m’éloignai, et après un triste souper, je passai la seconde nuit dans la même position que la première.

Je commençais à me repentir vivement