Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 3, 1795.djvu/234

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seuls motifs qui la réveillent ; celui qui fait l’aumône veut, ou qu’on le sache, ou qu’il en puisse recueillir quelque fruit. On est revenu de l’idée de gagner le ciel par ces sortes de bonnes œuvres. On a démêlé l’intérêt puissant de ceux qui nous prêchaient cette doctrine. On s’est douté qu’une religion, d’abord adoptée par des pauvres, devait faire une vertu de l’aumône, — qu’une religion persécutée, devait crier à la bienfaisance, et qu’il fallait répandre un peu d’or sur les autels d’un dieu né dans la boue. La philosophie n’a perfectionné l’esprit de l’homme qu’en endurcissant son cœur… Elle lui a appris que pour épurer les lumières de l’un, il fallait se défier de l’organe trompeur de l’autre, et qu’on n’arrivait point à la découverte du vrai, sans renoncer à la chimère du bien. Et pour combien de gens dépravés d’ailleurs, ce malheureux état ne devient-il pas un attrait de plus ! saisis un instant avec moi le fil qui conduit dans les impénétrables détours du cœur